Ketty Le Cardonnel/ Aujourd’hui, nous constatons que les projets de transformation des locaux d’entreprise sont beaucoup plus courts qu’auparavant, avec des délais de réalisation de 6, voire 4 mois...
Barbara Grizelj/ Chez IN’LI, la création de notre nouveau siège et l’emménagement ont pris moins d’un an. Ce nouveau lieu participe au sentiment d’appartenance, c’est un facteur qui a renforcé la création d’équipes dans un contexte de fusion. Ce délai court nous a permis de concrétiser plus vite la fusion de nos marques.
Olivier Dangréaux/ La trajectoire de Gecina est assez similaire. Il s’agissait sur un temps plutôt court de mélanger les collaborateurs issus de la fusion de deux foncières au sein d’un environnement accueillant. Dans notre cas, il ne s’agit pas d’un déménagement, mais d’une transformation totale de nos locaux.
KL/ Lorsque l’on souhaite mener un projet d’amélioration de l’environnement de travail, par quoi doit-on commencer ?
OD/ Il faut d’abord interroger en amont les collaborateurs et les Instances Représentatives du Personnel pour essayer de comprendre quelles sont les attentes. Mais il ne faut pas se limiter à cela ! D’une part, parce que des personnes habituées à un environnement depuis des années ne seront pas forcément prêtes à le voir intégralement modifié. Ensuite, parce qu’elles ne seront pas nécessairement au courant de toutes les possibilités existantes. L’enjeu est de créer de l’envie en proposant, en expliquant… En avançant dans le projet, il faut beaucoup communiquer pour répondre aux interrogations. La mise en situation est toujours constructive. Chez Gecina, notre projet de transformation se développe étage par étage. Nous avons donc mis en place un espace témoin avec des bureaux équipés des nouveaux postes de travail, d’écrans et de casques pour que chacun puisse s’imprégner de son futur environnement.
BG/ Effectivement, il y a un travail de conception et d’explications en amont, mais cela reste conceptuel tant que l’on n’expérimente pas l’espace soi-même. Une fois les locaux en place, il faut suivre ce qu’il s’y passe jour après jour, dans une logique d’amélioration continue. L’espace de travail devient un enjeu de management : les salariés s’en parlent et construisent ensemble leurs usages ou les améliorations à y apporter. Même si les projets sont très cadrés, il y a toujours une part d’expérimentation avec une marge d’adaptation pour faire évoluer les espaces.
Olivier Dangréaux
KL/ Qui est impliqué dans les projets de transformation ?
OD/ Les métiers, les IRP, le Comité de Direction, les fonctions logistiques...
BG/ Sans oublier l’aménageur, qui doit pouvoir répondre aux attentes concernant les délais et comprendre l’évolution culturelle de l’entreprise. Avec la DSI, il doit aussi saisir les enjeux et les contraintes digitales.
KL/ Quid du Responsable des moyens généraux, devenu Facility manager puis Directeur de l’Environnement de Travail ? Cela modifie-t-il son rôle ?
OD/ Le changement de termes n’est pas neutre. Les Services Généraux étaient vraiment centrés sur le matériel. Aujourd’hui, on est clairement dans un objectif d’animation pour faire vivre le bâtiment tout en gardant la dimension technique.
BG/ Le DET doit être au plus près des équipes et des parties prenantes pour encourager le développement des usages, adapter la configuration de l’espace en fonction des besoins, etc.
KL/ Au final, qui doit piloter les projets de transformation des espaces ?
OD/ Celui qui en a le plus envie ! Pas besoin de règle précise, c’est un travail d’équipe. Certaines personnes peuvent prendre le lead, sans souci d’étiquette.
BG/ Le couple DSI-DRH reste le pilier central sur le pilotage, le calendrier ou les processus de sélection. Les responsables Équipement et Communication ont bien sûr leur rôle à jouer également.
KL/ Quels sont justement les rôles exacts de la DRH et de la DSI dans ces projets ?
OD/ Pour la DSI, c’est le choix des outils, le dialogue avec l’aménageur et le dialogue avec la DRH pour établir un plan de formation aux outils.
BG/ La DRH échange beaucoup avec les équipes, notamment avec les ambassadeurs métiers qui font part des besoins des entités.
KL/ Quels sont les bénéfices d’une collaboration DSI-DRH renforcée ?
BG/ La coordination DSI-DRH permet de développer la co-construction du plan de transformation. En tant que fonctions support, on se retrouve sur les usages métiers, qui forment notre vocabulaire commun. Chez IN’LI, notre projet de déménagement a été totalement co-construit entre DSI et DRH, avec une participation très forte des IRP dans l’expérimentation et le choix des outils.
OD/ Partager de telles responsabilités est un facteur de cohésion. Chaque entité apprend de l’autre, l’échange est très riche.
KL/ Existe-t-il des difficultés dans le dialogue DSI-DRH pour la transformation des espaces ?
BG/ Il y a quelques années encore, le travail était relativement cloisonné, avec une équipe DSI qui conduisait des projets de son côté et les RH qui leur « couraient après » pour obtenir des éléments d’information et être capables de présenter les solutions aux métiers.
OD/ DSI et DRH ont longtemps fonctionné en parallèle, mais ne se rejoignaient que ponctuellement. Aujourd’hui, le travail est plus transverse. En tant que fonctions support, on se retrouve sur les usages métiers, qui forment notre vocabulaire commun. Et chacun fait un effort pour ne pas jargonner ! Le langage digital s’est par ailleurs largement répandu, ce qui simplifie la communication.
KL/ Les jeunes générations de salariés « digital natives » sont très sensibles à l’environnement de travail : quels éléments vous paraissent indispensables pour renforcer la marque employeur et attirer ces jeunes talents ?
BG/ Proposer des espaces représentatifs du travail en mode projet et de la variété des équipes à géométrie variable. Ils doivent aussi refléter l’ouverture de l’entreprise à l’extérieur en accueillant des start-up, des consultants, des freelances...
OD/ Ces nouveaux espaces suggèrent aussi un rapport hiérarchique moins fort, plus horizontal : on peut par exemple limiter les rapports de pouvoir trop apparents en proposant des espaces et des terminaux assez similaires pour tous. Certaines attentes sont intergénérationnelles, gardons-nous de penser que seuls les jeunes sont séduits par ces nouveaux modes de travail ou de management.
BG/ Et il faut d’ailleurs aider les managers à s’adapter à ces nouveautés. C’est par les projets qu’ils peuvent s’approprier les espaces et les outils, intégrer les principes d’expérimentation, de droit à l’erreur ou d’amélioration continue.
Barbara Grizelj
KL/ La réussite d’un nouvel environnement de travail, c’est une question de moyens, d’outils, d’idées ?
OD/ Tout cela à la fois ! Les idées directrices sont essentielles. Dans le projet Gecina, nous avons fait le choix du meilleur pour tous. Nous avons supprimé les postes fixes et opté pour des terminaux mobiles. On uniformise les outils, du (dirigeant ?) cadre supérieur au comptable. Tout le monde a le droit à un matériel de qualité. Cela a un coût, mais on constate rapidement le retour sur investissement en termes de productivité, d’ambiance et de satisfaction des collaborateurs, qui peuvent travailler dans des lieux adaptés à leurs missions. La cohérence entre l’aménagement de l’espace et les outils est essentielle. Il est aussi important d’uniformiser les technologies (prises, systèmes de connexion, etc.) : quand on comprend comment fonctionne un espace, on peut tous l’utiliser au mieux. Nos 40 salles de réunion ont le même équipement pour la réservation, la connectique et l’animation.
BG/ Effectivement, on a besoin d’un concept pour porter du sens auprès des collaborateurs et faire le lien avec la stratégie de l’entreprise. Disposer d’un matériel « au top », cela veut dire aussi des moyens ! Chez IN’LI, nous avons également opté pour l’uniformisation des terminaux, pour que chacun ait accès à du matériel de qualité. C’est un prérequis par rapport à nos souhaits de mobilité des collaborateurs dans les nouveaux espaces et à notre accompagnement du télétravail.
KL/ Transformer les espaces, est-ce aussi concrétiser le changement culturel de l’entreprise ?
BG/ L’espace de travail est l’un des composants qui illustre la transformation du travail en général. Les nouvelles façons de travailler inspirent la stratégie des entreprises, avec des enjeux d’efficacité et de marque employeur. Les outils digitaux, l’évolution des process pour plus de collaboratif, le développement de la mobilité sont attendus par une partie des salariés. Les plus réticents ont besoin d’une présence support, d’experts digitaux qui peuvent les aider à s’approprier les outils et être acteurs de cette évolution culturelle.
OD/ La formation et l’accompagnement quotidien des utilisateurs sont essentiels. Chez Gecina, nous avons eu recours aux services des « Men in Black », les coachs digitaux d’Orange Consulting pour aider chacun à s’approprier les outils. Ils assurent une présence rassurante sur les plateaux. La conduite du changement doit constituer une part essentielle du projet de transformation et de son budget. Elle ne se limite pas à un programme de formation, nous l’intégrons dans notre comité de pilotage pour définir la stratégie du programme d’adoption.
KL/ Une dernière question plus personnelle pour terminer : à quoi ressemble votre bureau aujourd’hui ?
OD/ Il est collectif ! Plus aucun bureau n’est fermé chez Gecina. Nous avons tous les mêmes équipements et outils.
BG/ C’est un bureau ouvert, comme l’ensemble des bureaux au sein d’IN’LI, que nous partageons avec notre DSI. Il est doté d’une belle Surface Hub Microsoft qui s’adapte à nos usages, faisant du bureau un espace de co-construction avec nos collègues des systèmes d’information.