Ces dernières années, l’IA dite « classique » a connu un développement rapide : un succès dû aux bénéfices étendus, autant que mesurables, qu’elle engendre. C’est particulièrement le cas dans les usines où les outils de Machine Learning ont été testés sur un grand nombre de cas d’usages. Cependant, l’avènement récent et soudain de l’intelligence artificielle générative (AIGen) est venu rebattre les cartes : son « apport créatif », rendu possible par la reproduction des comportements humains, laisse entrevoir un immense potentiel. Celui-ci s’accompagne toutefois de nombreux dilemmes.
1 – Tout de suite ou plus tard ?
Nombreux sont les dirigeants à s’inquiéter de l’accroissement de la concurrence dû à l’AIGen, craignant notamment l’émergence de nouveaux acteurs sur leurs marchés. Beaucoup sont donc tentés de déployer, sans plus attendre, cette technologie de rupture au sein de leur organisation. Ils y voient l’opportunité d’améliorer la rentabilité de leur core business et d’exploiter de nouvelles sources de création de valeur. Encore faut-il avoir conscience des risques liés à un changement si important. Prudents, d’autres dirigeants redoutent des « chocs de rupture » pouvant menacer leur organisation, et même leur business model.
2 –Transformation digitale classique ou révolution ?
C’est là le principal dilemme qui se pose à chaque dirigeant désireux d’adopter l’AIGen : s’en tenir à une transformation digitale « standard », en accumulant les cas d’usages, ou enclencher une transformation bien plus profonde impactant l’ensemble des métiers de l’entreprise, le tout en symbiose avec la DSI.
Cette seconde option implique obligatoirement une acculturation des équipes – et notamment du Top Management – afin de lever les craintes associées à l’IA. Le Comité exécutif d’une grande entreprise du secteur automobile a par exemple suivi deux jours de formation, ses membres allant jusqu’à s’initier à la programmation en Python.
Autre prérequis incontournable, la constitution de bases de données de qualité permettant de faire circuler la data hors des habituels silos liés aux métiers. La mise en place de centres de compétences centraux permet ensuite d’exploiter de manière intensive la data collectée, et ainsi de « cross-fertiliser » les pratiques en faisant émerger des cas d’usages transverses.
3 – Seul ou accompagné ?
Si certains dirigeants choisissent de mener leur « transition IA » avec des ressources exclusivement internes, d’autres préfèrent être accompagnés par des structures spécialisées, compétentes sur l’ensemble de la chaîne de transformation : identification des besoins, déploiement des solutions, analyse des résultats, conduite du changement… La sensibilisation des équipes aux écueils liés à l’IA et au respect des principes éthiques est un préalable, aussi bien en mettant en garde les métiers contre les différents biais et mauvais fonctionnements de l’IA, qu’en incitant les dirigeants à choisir des solutions souveraines et frugales.
4 – Budget standard ou ligne dédiée ?
Les premières initiatives en matière d’intelligence artificielle se font, dans la majorité des cas, dans le cadre des budgets SI standards. Mais, à mesure que le nombre et l’ampleur des projets croissent, les dirigeants sont tentés d’adopter une ligne budgétaire dissociée permettant de sanctuariser des projets IA au sein de chaque direction métier. Une entreprise de service à l’industrie présente dans 45 pays a ainsi adopté un budget central et mené en parallèle des actions pédagogiques auprès des équipes pour expliquer l’équation économique de l’IA.
5 – Foisonnement d’initiatives ou pilotage central ?
La gouvernance de ces outils constitue un sujet stratégique. Une direction peut ainsi choisir de laisser aux métiers une large liberté d’expérimentation, ce qui permet de progresser rapidement, sans mobiliser de ressources supplémentaires. Elle peut aussi mettre en place un pilotage central afin de donner aux métiers et aux entités une ligne directrice et des priorités. Un acteur majeur de l’énergie, qui utilise l’intelligence artificielle pour des sujets aussi variés que la détermination du prix en station-service ou la gestion de centrales solaires ou éoliennes, a ainsi mis en place une « digital factory » centralisant l’ensemble des process IA de l’entreprise.
6 – « Make or buy » ?
C’est l’une des questions sur lesquelles les dirigeants se montrent les plus indécis : faut-il recourir à des solutions externes basées sur des cas d’usages génériques permettant de rapidement déployer les outils, ou le sur-mesure est-il préférable ? Si la seconde option est, sur le papier, garante de meilleurs résultats, elle se heurte à un coût élevé et à la difficulté de mesurer la rentabilité des cas d’usages.