Si l'objet bouge, demandez-lui ce qu'il fait. S'il ne bouge pas, demandez-lui pourquoi. Parler aux objets est-il un signe de folie ou une perspective d'avenir ?
Au sein de l'intelligentsia du Web, de nombreuses anticipations ont été formulées vis-à-vis de l'« Internet des choses ». Les conversations à ce sujet se font de plus en plus fortes, et la transformation de ce concept en réalité ne semble plus très loin.
L'Internet des choses est ce que l'on obtient en repoussant les frontières physiques du Web, au-delà des centres de données et des ordinateurs portables, pour englober toutes sortes d'objets : un colis, un arbre, un ascenseur, une webcam, un capteur d'humidité situé dans le mur d'un bâtiment... Mais le concept d'Internet des choses ne se limite pas aux capteurs et aux communications. C'est la capacité à négocier les informations sur l'Internet public, en tirant avantage de l'effet de réseau énoncé par Robert Metcalfe. Kevin Kelly, rédacteur en chef de Wired, offre une bonne approche de l'idée. Consultez son discours sur les 5 000 prochains jours du Web.
Voici une rapide visite guidée des événements qui rendent l'Internet des choses si actuel :
• Les géants Cisco, Sun et SAP croient en l'utilité des objets intelligents, et pensent que ceux-ci devraient adopter la nouvelle lingua franca : l'IP. Ils ont créé l'alliance IPSO avec pour objectif de mettre en place une interface et une pile de protocoles communes pour l'ensemble des objets, quel que soit le secteur d'activité desservi. Ils proclament fièrement ce changement comme le début de l'Internet des choses.
• L'UE a mis en place une consultation publique sur l'Internet des choses.
• La Commission Européenne, avec l'IPv6, se penche à présent réellement sur le sujet. Bruxelles souhaite fermement que l'industrie des télécommunications adopte ce protocole, et pourrait, dans le cas contraire, menacer de rendre obligatoire cet alignement. Les six milliards d'adresses potentielles de l'IPv4 s'épuiseraient rapidement si chaque appareil électroménager devait être connecté à Internet. L'IPv6 offre un potentiel de connexion de 3,4×1038 objets, en supposant que nous puissions en trouver autant dans le monde.
• Enfin, les communications M2M mobiles et la RFiD, précurseur de l'Internet des choses, font l'objet de prévisions extrêmement positives. Berg Insight évalue à 14 millions les modules M2M sans fil utilisés aujourd'hui en Europe, dans des applications aussi diverses que les compteurs électriques intelligents et les systèmes de repérage des véhicules, chaque module étant relié à un capteur ou à un actionneur. Ces éléments font office de précurseurs en ce qu'ils communiquent en circuit fermé. L'Internet des choses pourrait permettre de se connecter directement aux objets du monde réel, par le biais de l'Internet public.
L'un des inconvénients de ce sujet dans l'air du temps à trait à la terminologie. L'Internet des choses nous confronte à toutes sortes d'expressions étranges : objets intelligents, motes, mems, poussière intelligente, Web 3.0, intelligence ambiante, Zigbee, et ainsi de suite. Mon terme favori a été inventé par l'auteur de science-fiction Bruce Sterling : « spime ». Selon son concept, il s'agit d'un objet constamment conscient de lui-même et de son environnement, émettant en permanence des données, publiées directement sur le Web. Depuis la création de ce concept, la situation a quelque peu évolué : il existe aujourd'hui les blogjects et les tweetjects. Ce sont des objets qui bloguent et qui communiquent sur Twitter. Si tout cela vous parait déroutant, préparez-vous à vous gratter davantage la tête en consultant ces définitions de l'Internet des choses.
Si vous essayez toujours, en vain, de comprendre le concept, lisez cette explication de Vint Cerf, de Google :
« Nombre des objets connectés à l'Internet fixe ou mobile sauront où ils se trouvent, d'un point de vue à la fois géographique et logique... Une fois activés, les objets découvriront tout naturellement les autres appareils situés à proximité... Si vous le souhaitez, votre téléphone portable se souviendra des endroits où vous vous êtes rendu et gardera la trace des objets dotés d'une étiquette RFID, tels que votre porte-documents, vos clés de voiture et vos lunettes. Vous n'aurez qu'à demander : « Où sont mes lunettes ? » Votre téléphone portable ou votre ordinateur vous répondront alors « La dernière fois que le système RFID les a repérées, vous vous trouviez dans le salon. »
Il est donc heureux que l'Internet des choses ne soit pas destiné à un usage banal.
Journaliste depuis prés de 20 ans et diplomé en Sciences et Philosophie, j'ai créé en 2002, l'agence Futurity Media avec Anthony Plewes. L'objectif de notre agence est d'accompagner les entreprises à identifier des sujets émergents dans le domaine des nouvelles technologies.