Inutile de préciser que la transformation numérique est devenue une opportunité pour toutes nos entreprises, voir une priorité. Une mutation qui impacte l’ensemble des silos, des ressources humaines, au marketing en passant par la finance. Pour évangéliser et mener à bien cette transformation, un nouveau métier a vu le jour, celui de Chief Digital Officer. En quoi consiste ce métier ? Est-il amené à durer ou évoluer ? Éléments de réponse.
Naissance d’un nouveau métier
Le numérique a progressivement chamboulé nos modes de communication et d’information, avec une influence d’abord mineure sur nos entreprises. Celles-ci ont fait de la technologie un atout périphérique en investissant ces nouveaux canaux sans grande certitude. C’est ainsi que le digital était rattaché à la direction de la communication, voire au mieux à la direction générale, mais avec un champ d’action limité. Posséder un site internet, une présence sur les médias sociaux et au mieux une app mobile faisait de l’entreprise un acteur « digital friendly ».
Quelques années plus tard, après l’arrivée des Deezer dans la musique, AirBnB dans l’Hôtellerie et autres Uber dans la mobilité, l’électrochoc fut brutal et ne laisse aujourd’hui que peu de doute sur la suite : nos entreprises traditionnelles doivent s’adapter pour espérer rester à la page ou accepter de mourir.
C’est il y a environ 3 ans que la fonction de CDO (Chief Digital Officer, à ne pas confondre avec le Chief Data Officer) a ainsi vu le jour pour accélérer la transformation des organisations, favoriser l’évolution de la relation avec le client et redéfinir la connaissance interne. Un véritable héros, sur les épaules duquel repose évidemment beaucoup (trop ?) d’espoirs.
Le cabinet Accenture affirme que 80% des grandes entreprises mondiales ont déjà un CDO pour piloter le changement. Elles sont en réalité à peine la moitié à avoir fait le pas. Il y aurait ainsi un peu plus de mille CDO dans le monde.
Qui est le Chief Digital Officer ?
Cette fonction requiert évidemment une forte culture numérique, mais aussi une grande capacité à associer celle-ci à une culture d’entreprise. C’est pourquoi les CDO ne sont clairement pas des « digital natives ». Ce poste à responsabilités est destiné à des profils avec une vraie compréhension de l’entreprise et de ses problématiques, tout en ayant la fraicheur de s’être familiarisé avec le numérique. En majorité ces professionnels déjà en poste ont plus de 40 ans.
Autant dire que ce profil est rare. C’est le cas de Patrick Hoffstetter, CDO de Renault, sorti d'HEC en 1990 ou Gilles Cochevelou, CDO de Total, sorti de Polytechnique en 1985. Pour d'autres entreprises, ce nouveau vent frais doit-être apporté par de plus jeunes profils moins bridés par la culture d'entreprise. C'est le cas de Matthieu Tanguy, CDO de Direct Energie, qui a quitté les bancs de l'école en 2003.
Sur le plan hiérarchique, les CDOs rapportent à la direction marketing, à la communication ou RH, mais surtout pour la plupart directement à la direction générale. Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à rejoindre le COMEX. La fonction a donc une importance stratégique dans les entreprises. Chez L’Oréal, le président Jean-Paul Agon a décidé de recruter Lubomira Rochet (ex-Microsoft), pour évangéliser et transformer en profondeur une entreprise qui, pourtant se porte très bien. Pour la première fois, une Chief Digital Officer (CDO) est rentré en 2015 au conseil d’administration d’une entreprise.
Par ailleurs, chez AXA France, le CDO est quant à lui rattaché à la Direction Marketing, quand chez ACCOR il porte le marketing, mais aussi la distribution et la DSI, et qu’il est donc rattaché au CEO.
Quelles sont les missions du Chief Digital Officer ?
Comme tout métier émergent, le chief digital officer occupe des missions qui varient d’une entreprise à une autre et ne pourront que difficilement être standardisées. En effet, d’une culture d’entreprise à une autre, d’une organisation à une autre, les enjeux varient.
Cependant quelques grands travaux reviennent systématiquement et semblent indispensables, quelle que soit l’entreprise.
#1 Définir son périmètre
Fonction émergente, sa fiche de poste n’est pas gravée dans le marbre. Il convient donc de définir clairement sa feuille de route avant même de rejoindre l'entreprise.
Globalement transverse dans l’organisation, le CDO définit et pilote la stratégie de transformation interne et externe pour intégrer de nouveaux outils et des méthodes plus agiles.
Lubomira Rochet de L’Oreal a par exemple passé 3 mois à écouter, puis 10 jours à réfléchir et structurer sa mission.
Chaque entreprise étant à un stade plus ou moins avancé de sa transformation, il convient de définir la liste des besoins étapes par étapes. Ceux-ci vont évoluer en fonction des objets assignés au CDO à son arrivée.
Quel est l’existant ? Quels sont les projets lancés ? S’informer passe par la rencontre de nombreux collaborateurs.
Pour préciser son périmètre, le CDO doit enfin savoir s’il dispose d’un budget spécifique ou s’il devra avancer financièrement avec les différentes directions.
#2 Recruter son équipe
Malgré son importance dans l’entreprise, le CDO n’est pas à la tête d’une importante équipe contrairement au Chief Marketing Officer par exemple. Il faut dire qu’il évolue tel un électron libre, en se déplaçant au fil des besoins d’une division à une autre pour prêcher seul la bonne parole. Il doit s’appuyer sur un réseau de collaborateurs qui lui seront rattachés pour accomplir sa mission, mais aussi d’ambassadeurs sensibles au numérique dans les différentes directions. Des talents motivés repérés en amont.
Une petite équipe fonctionnant en mode « startup », soit de façon réactive et agile.
#3 Bâtir son écosystème
Depuis le milieu des années 2000 s’opère un transfert des innovations marquantes, de l’intérieur des grands groupes vers l’extérieur. C’est ainsi que de nombreuses startups viennent à la rencontre de grandes entreprises pour présenter leurs solutions et services. Le CDO a ici pour objectif de faire le pont entre ces innovateurs, qu’ils soient startupers, mais aussi chercheurs ou étudiants, avec les diverses directions de l’entreprise. En étroite relation avec le directeur de l’Innovation, il accompagne souvent ces jeunes pousses pour tester leurs projets, et parfois les intégrer au sein de l’entreprise.
Cette démarche d’open innovation permet de s’ouvrir sur d’autres univers, apprendre de cet écosystème pour capitaliser sur son agilité et son expertise.
#4 Acculturer les collaborateurs au Numérique
Avant de prétendre transformer l’offre et les services de l’Entreprise, il convient de former et sensibiliser celles et ceux qui mèneront l’entreprise dans cette direction. Le Chief Digital Officer ne pourra évidemment pas transformer l’entreprise seule, sa mission est d’acculturer l’ensemble des collaborateurs, pour que ceux-ci pensent et agissent comme des « digital native ».
Il s’agit donc pour le CDO de démontrer l’impact positif du numérique, ce qui passe notamment par le développement de nouvelles activités ou de nouvelles organisations du travail.
Quel avenir pour le Chief Digital Officer ?
La question que l’on est en droit de se poser est de savoir si ce métier de CDO sera durable ou disparaitra avec le temps ? Difficile de répondre à cette question, même s’il semble évident que l’entreprise devra toujours rester en alerte sur les nouvelles tendances à venir. Une chose est sûre, la transformation de nos entreprises ne fait que commencer à l’heure de l’internet des objets et de l’intelligence artificielle.
Vincent
Pour aller plus loin
Accélérons ensemble vos projets
Les solutions de communication sont une composante essentielle au fonctionnement d’une entreprise
Internet des objets : créer de nouveaux modèles d’entreprise
Après des débuts dans le monde des Telecoms et de la Communication, j’ai rejoint le digital Think Tank HUB Institute pour créer et développer la division des contenus. Aujourd’hui conférencier et expert de l'Economie Numérique, de l'Innovation Ouverte et de l'Internet des Objets, je suis également associé au média Maddyness, acteur français référent sur les startups.