relation client digitale : la valeur est dans l'humain !

Le numérique a rendu le parcours client plus souple ; il l’a parfois aussi déshumanisé. L’heure est-elle au rééquilibrage ? Quel que soit le secteur, replacer l’humain au centre des stratégies digitales, en renforçant la proximité sociale entre le client et l’entreprise, devient une priorité.

du self-service au parcours client assisté

Le Web et le mobile devraient concentrer en 2014 un tiers du volume total des interactions entre les clients et les entreprises, d’après une estimation de Markess sur le marché français. De fait, ils ont profondément modifié le paysage du self-care, offrant immédiateté, disponibilité, gratuité, facilité d’accès aux informations. Ils ont permis de développer de nouveaux modes de contact ou d’en optimiser d’anciens en mixant des supports ou canaux traditionnels avec des supports ou canaux digitaux.

L’hybridation des canaux et modes de contact a permis de pallier les faiblesses du self-care à certaines étapes du parcours client ou de s’adapter à l’évolution des usages. Mais si l’efficacité immédiate prime sur les attentes relationnelles lors d’un parcours en self-care, le besoin d’accompagnement devient indispensable lorsque le client autonome est en situation d’échec.

Plus que la défaillance du système, c’est l’impossibilité de passer d’un parcours en autonomie à un parcours assisté qui fâche. Quel que soit le support utilisé, le client veut avoir le sentiment d’une forte présence, ne serait-ce que potentielle, mais toujours humaine, de l’entreprise ! D’où l’importance d’une maîtrise de l’orchestration des rebonds entre canaux ou modes de contact. La réintroduction de l’expertise humaine à certains moments clés du parcours est dès lors l’un des leviers d’amélioration du taux de conversion et de la satisfaction client

un besoin de tangible et d’émotions

Au-delà des bénéfices fonctionnels, l’accompagnement humain offre des bénéfices de nature sociale, voire émotionnelle, de l’ordre du plaisir de l’interaction réelle avec une personne physique. C’est précisément parce que la communication digitale et la virtualisation des points de vente prennent de plus en plus d’importance que le consommateur est à la recherche de matérialité, de proximité et de sentiments dans son expérience. Il se sent ainsi mieux valorisé par l’entreprise.

Cette tendance s’exprime à travers l’attrait pour d’anciens supports physiques tel le disque vinyle, porteur d’histoire et d’émotions, dont les ventes ont progressé de 32% depuis 2012. Même constat du côté de la photo avec le retour de l’argentique et de procédés plus anciens repopularisés par des applications mobiles comme Instagram. Le plaisir est dans l’objet, la texture. Le toucher renforce l’attachement. L’ouverture d’un colis au packaging soigné, venant d’être livré, peut ainsi “réchauffer” un parcours d’achat en ligne perçu comme froid et distant, créant une intimité presque “physique” avec la marque.

plus que le client, c’est “l’humain”

Pour qu’elle soit durable, la relation client-entreprise nécessite la construction d’un attachement mutuel. Ce lien social se nourrit des aspects cognitifs et affectifs des interactions passées entre le client et l’entreprise. La construction de ce lien passe notamment par le partage de moments entre les membres d’une même communauté, les entreprises jouant dès lors un rôle de facilitateur d’échanges sociaux. La dynamique enclenchée par l’économie collaborative, qui repose sur l’échange et le partage entre individus, incite ainsi les entreprises à faire vivre à leurs clients des expériences enrichissantes humainement.

C’est le rôle que s’est donnée l’enseigne Castorama en facilitant les échanges et le partage de connaissances dans la communauté des bricoleurs. A l’occasion du festival international OuiSHareFest, Castorama a annoncé le lancement courant 2014 d’un site Internet de partage de conseils, de vidéos et autres tutoriels qui se veut être le “Wikipédia du bricolage”. L’enseigne y ajoute un volet pédagogique, via des MOOCs, formations gratuites dans le domaine du bricolage, du jardinage ou encore de la décoration. Elle développe ainsi une proximité sociale via un réseau de solidarité et une communauté d’intérêts entre passionnés. Elle multiplie de la sorte les opportunités de contacts avec ses clients, pour mieux les comprendre, les connaître et tisser des liens avec eux, au cœur de sa politique de fidélisation.

C’est ce degré de proximité qu’un pure-player comme Amazon essaie de créer avec son nouveau service MayDay. Ce bouton, préinstallé dans la nouvelle tablette Kindle Fire HDX, offre une assistance technique en visio avec un opérateur qui assiste le client en co-browsing. Amazon aide ainsi les clients à utiliser leur nouvelle tablette sans rupture de canal. Au-delà de la proximité fonctionnelle qu’il essaie de créer en s’impliquant auprès du client après l’achat, c’est la proximité réelle qu’il met en avant dans ses publicités. Celles-ci mettent en scène des conversations entre le conseiller Amazon et le client qui partagent des moments de vie personnels, dans un style langagier familier et informel, donnant une tonalité affective et sincère à la discussion. Il ne s’agit plus de traiter le client comme tel mais comme un proche. La “réhumanisation” de la relation client n’est donc pas tant une question de technologie qu’un travail relationnel mis en œuvre par le vendeur ou le conseiller. Ce travail requiert des capacités à générer une écoute empathique, de la considération, un sens de l’hospitalité, et à gérer les émotions et les conflits.

A l’heure où les clients “professionnalisent” de plus en plus leurs interactions avec l’entreprise, la symétrie des attentions est plus que jamais nécessaire. Mais l’entreprise n’est pas crédible à jouer la carte d’une relation plus “attentionnée” avec ses clients si elle-même n’écoute, ne reconnaît ni ne valorise ses propres collaborateurs.

Sylvie Lorrain

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Sylvie Lorrain

Analyste chez Sofrecom depuis 2005, je cherche les bonnes pratiques, décrypte les nouvelles tendances, analyse les usages innovants et les stratégies d’acteurs. Parmi mes sujets de prédilection : les nouvelles dynamiques d’échange, celles qui conduisent à partager les espaces de travail, les objets, les idées, les savoirs, le management (…), entre clients, collaborateurs, partenaires ; celles qui sont porteuses de lien social et de sens.  Mon métier m’amène ainsi à explorer des secteurs d’activités, des zones géographiques, des sociétés très différentes.

La culture japonaise m’inspire tout particulièrement par ses contrastes, par sa capacité à lier modernité et tradition, par le rapport qu’elle entretient avec la Nature, par l’art de la calligraphie et du papier, par l’imaginaire que je lui associe.