La collaboration Shell X MIT
Crises pétrolières, ouvertures des pays de l’Est, révolution numérique… Nous sommes à la fin du XXème siècle : bouleversée par ces mutations, la société pétrolière Royal Dutch Shell décide alors de revoir complètement sa stratégie et son système de management.
Arie de Geus, son directeur général adjoint, se rend au MIT pour lancer une recherche sur les fondements de « l’Organisation du futur ». Il y rencontre l’enseignant-chercheur Peter Senge, avec qui il va développer le concept d’organisation apprenante.
Le fruit de cette collaboration ne va pas uniquement déboucher sur un modèle de management, mais sur une philosophie humaniste impliquant un travail à la fois collectif et personnel… D’où sa complexité.
L'organisation apprenante : dix principes et plus encore
Entreprise apprenante : quelle définition ?
Un mode d’organisation, une philosophie humaniste, de quoi parle-t-on exactement ?
Peter Senge définit l’entreprise ou l’organisation apprenante comme « une entreprise qui soutient la mise en place d’une dynamique d’apprentissage en continu et en équipe […] tout en favorisant la valorisation de chacun et l’expérimentation. » L’idée ? Susciter la réflexion et la créativité par les échanges transversaux « en admettant que les solutions d'hier sont les problèmes d'aujourd'hui. » L’objectif ? Augmenter la performance de l’organisation et anticiper les transformations futures.
En plaçant l’apprentissage au cœur de son modèle, l’entreprise apprenante s’apparente à une innovation managériale. Elle donne plus de libertés aux collaborateurs mais aussi plus de responsabilités. Chacun a pour objectif d’enseigner et d’apprendre, ce qui confère à tous une certaine humilité et bouscule la notion de hiérarchie. On touche donc au management mais pas que. Il s’agit aussi de transformer les pratiques et postures collaboratives tout en visant l’équilibre entre épanouissement personnel et performance collective.
Des objectifs individuels et collectifs
La définition étant posée, concrètement qu’est-ce que l’organisation apprenante suppose aux niveaux individuel et collectif ?
Dans son livre La Cinquième Discipline, Peter Senge nous explique que pour qu’une organisation soit apprenante, plusieurs objectifs doivent être visés.
A titre individuel,
- Objectiver la réalité
- Prendre conscience de ses biais cognitifs et s’en affranchir
A titre collectif,
- Aligner l’ensemble des parties prenantes sur une même vision
- Favoriser la réflexion et l’apprentissage collectif par le dialogue
L’organisation apprenante
La clé du concept : une vision globale et transversale
Outre ces dimensions individuelle et collective, Peter Senge nous parle de la clé de voute de sa théorie : c’est la pensée systémique, qui invite à voir le monde de manière globale et transversale, comme un écosystème et non comme plusieurs systèmes indépendants les uns des autres.
Pour nous autres français, voilà qui vient contrarier notre esprit cartésien, qui consiste notamment à résoudre les problèmes en les isolant des uns des autres. D’ailleurs, l’école procède de la même manière avec une approche par matière plutôt que par projet ou par problématique.
Pionnier dans la révolution du « management de la qualité » et auteur ayant fortement influencé Senge, W. Edwards Deming indique : « nous ne transformerons jamais le système de management prédominant sans transformer notre principal système d’éducation. Ce sont les mêmes systèmes. » Il ajoute d’ailleurs : « la relation entre un patron et un subordonné est la même que la relation entre un enseignant et un élève ». Ce qui interroge sur le management et, plus largement, sur la culture des entreprises.
Puisque nous venons de voir l’origine de l’organisation apprenante, je vous propose à la faveur d’un prochain article d’en aborder les bénéfices et les limites.
Consultante à Orange Consulting, j’accompagne les organisations dans leur transformation digitale, à travers l’adoption de nouveaux outils et usages numériques.