les softwares stimulent la reprise du marché informatique russe

En 2009, le marché informatique russe a subi une chute impressionnante de 40 % par rapport à l’année précédente. Mais la stabilité des prix du pétrole et l’essor de la classe moyenne ont favorisé sa reprise. IDC estime qu’il progressera de 7 % cette année pour atteindre 35 milliards de $, et poursuivra à ce rythme jusqu’en 2017 pour atteindre 46 milliards de $ en 2017.

une expertise logicielle en plein essor

La reprise est alimentée par la consommation grand public en matériel informatique, notamment les tablettes, mais également selon IDC, par la hausse des investissements en services informatiques, en logiciels et en matériels dans les secteurs du transport, des télécommunications, de l’énergie, de l'administration, de l’éducation et de la santé. Environ 7 milliards de $ y sont dépensés en services informatiques et près de 5 milliards de $ de plus en logiciels.

Le marché étant suffisamment important, la Russie a décidé de développer sa propre expertise en développement logiciel pour ne pas dépendre des exportations de la Silicon Valley. Le pays exporte désormais avec succès des logiciels développés pour son marché national, vers les États voisins comme dans le monde entier, grâce à des marques comme Kaspersky.

L’association RUSSOFT, dédiée aux professionnels de l’externalisation, estime que les exportations de logiciels ont atteint 4 milliards de $ en 2012, contre 2,75 milliards de $ l’année précédente. Des résultats imputables à part égale aux logiciels standards (développés par des éditeurs indépendants) et aux services de développement de logiciels (externalisés). Les deux secteurs progressent rapidement grâce à un solide un vivier de programmeurs.

On dénombre actuellement un million d’informaticiens en Russie, dont 300 000 sont employés dans des sociétés informatiques. Le portail Software‑Russia.com estime qu’environ 100 000 d’entre eux sont des programmeurs spécialisés dans le développement de logiciels, dont 50 % pour des logiciels clients destinés à l’exportation, et 50 % pour le marché national. Même si ces effectifs sont moindres que ceux de la Chine ou de l’Inde, par exemple, les taux de rotation du personnel, généralement inférieurs à 10 % par an, y sont beaucoup plus bas.

le développement logiciel offshore, un facteur d’attraction pour les entreprises occidentales

Ce vaste réservoir de talents incite de nombreuses sociétés occidentales à faire développer leurs logiciels en Russie, en recourant à l’externalisation ou en y délocalisant leurs centres de R&D.

La raison principale : les salaires. Bien que Moscou soit la deuxième ville la plus chère au monde en termes de coût de la vie, les salaires des informaticiens qualifiés n’y sont pas excessifs. Selon le site de recrutement ITmozg (voir la version anglaise sur software-russia.com), les salaires moyens des 500 000 informaticiens travaillant à Moscou atteignent 31 000 $ par an pour les programmeurs et 25 000 $ pour les administrateurs système. Des chiffres à comparer avec ceux de la Silicon Valley, où le salaire moyen d’un programmeur s’élevait à 118 000 $ en 2012.

Hors de Moscou et de Saint-Pétersbourg, dans les capitales régionales, le salaire moyen des développeurs descend entre 15 000 et 17 000 $.

Coûts de main-d’œuvre relativement bas et niveaux élevés d’éducation, en mathématiques et en ingénierie, font de la Russie une destination de plus en plus prisée pour le développement logiciel offshore.

une réputation reconnue

Comparées à leurs homologues indiennes, très axées sur les processus, les sociétés russes de développement de logiciels sont appréciées pour leur plus grande aptitude à mener une réflexion originale et à innover. Daniel Marovitz, directeur des opérations de la Deutsche Bank en charge des technologies bancaires internationales, a déclaré à Software Russia : « La Russie est un pays privilégié pour innover et tester de nouveaux horizons avec de nouveaux logiciels. »

Cette réputation est renforcée par une reconnaissance internationale. En 2011, la société Luxoft s’est vu décerner par l’EOA (European Outsourcing Association) le prix du fournisseur de services d’externalisation de l’année ainsi que le prix du projet d’externalisation informatique de l’année. D’autres fournisseurs figurent également parmi les 100 premières sociétés d’externalisation recensées dans le classement de l’IAOP (International Association of Outsourcing Professionnals),  tels que Artezio, Auriga, Epam, Exigen Services, First Line Software, IBA et Reksoft. Epam, avec ses 9 000 informaticiens majoritairement basés en Russie, est le plus grand acteur du secteur du pays.

de bons résultats à l’international

Les éditeurs de logiciels indépendants prospèrent également en Russie : leurs exportations se sont élevées à 1,6 milliard de $ en 2012, soit une hausse en 20 % par rapport à 2011. La moitié de ce chiffre d’affaires a été réalisé par Kaspersky, l’un des principaux fournisseurs de logiciels de sécurité en B2C. Ses concurrents russes Elcomsoft et Dr Web progressent également. Dans d’autres secteurs, des sociétés telles que Parallels (virtualisation Windows sur les systèmes d’exploitation Mac), Acronic (sauvegarde), Transas (logiciels pour le secteur de la marine) et CBOSS (systèmes OSS/BSS pour les télécommunications) exportent aussi leurs produits avec succès.

De très nombreuses sociétés occidentales ont investi dans le développement informatique en Russie, que ce soit pour adapter leurs produits existants à ce marché national en plein essor ou pour développer de nouveaux produits destinés à l’exportation : Alcatel-Lucent, Chrysler, Dell, Deutsche Bank, EMC, Ericsson, Google, HP, IBM, NEC, Microsoft, Nokia, Samsung, SAP, T-Systems, Oracle, sans oublier Intel, qui, avec plus de 1 000 techniciens en Russie, est peut-être le plus important.

quelles améliorations ?

D’autres entreprises pourraient les rejoindre si elles se débarrassaient de leurs préjugés. Selon un rapport d’Ernst & Young, les investisseurs évaluent très différemment la Russie selon qu’ils y soient déjà implantés ou pas encore. L’enquête d’Ernst & Young sur l’attractivité de la Russie indique que « les investisseurs non encore implantés dans le pays ont une connaissance limitée des opportunités d’investissement offertes par la Russie. » Ainsi, les investisseurs déjà présents dans ce pays notent l’infrastructure de télécommunications deux fois mieux que ceux qui ne le sont pas encore.

Mais ce n’est pas seulement une question de marketing. Selon Ernst & Young, « Le développement de solides appuis institutionnels, un environnement économique favorable, des infrastructures modernes et une forte capacité d’innovation sont essentiels pour que la Russie améliore son image auprès des investisseurs étrangers potentiels. »

L’économie russe réalise actuellement un taux de croissance annuelle de 3 à 4 %, ce qui est légèrement supérieur à la moyenne de l’UE mais bien inférieur à celui des locomotives asiatiques et latino-américaines. Mais elle va évoluer pour résoudre ses handicaps que sont la pauvreté des infrastructures de transports ainsi que la complexité et l’hétérogénéité des réglementations commerciales. La Russie prévoit par ailleurs de construire des lignes de train à grande vitesse et des autoroutes, et va se doter d’infrastructures mieux adaptées aux entreprises, ce qui devrait lui permettre d’atteindre un taux de croissance économique annuelle compris entre 6 et 7 %.

Dans la 2e partie de ce billet, je parlerai du développement de l’industrie domestique des logiciels et de la communication du pays, en abordant aussi bien les principales plates-formes de médias sociaux que les facteurs expliquant les temps de connexion particulièrement élevés des internautes russes.

Stewart

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Stewart Baines
Stewart Baines

Journaliste depuis prés de 20 ans et diplomé en Sciences et Philosophie, j'ai créé en 2002, l'agence Futurity Media avec Anthony Plewes. L'objectif de notre agence est d'accompagner les entreprises à identifier des sujets émergents dans le domaine des nouvelles technologies.